Maintenant
qu’une bonne partie de la poussière est retombé, je me sens d’attaque pour
écrire le récit de ma dernière course.
Les mois
d’hivers ont été long jusqu’à 3 semaines avant la course. Les matins à entendre
le cadran me dire que la piscine m’attendait, les soirs ou je donnais les
bisous à mon garçon assis sur mon vélo et les journées trop froides pour mettre
le nez dehors ou je me sentais littéralement comme un oignon tellement j’avais
de vêtement pour courir.
À quelques
heures de prendre le départ pour ce long voyage, c’est la panique qui
s’installe. Il annonce chaud et ici la chaleur n’est pas encore arrivée. Je
vais donc voir rendu là-bas et ça ne sera surement pas si pire.
À trois
jours de la course une rumeur s’installe, une lueur d’espoir, il annonce
tellement des pluies diluviennes que les autorités voudraient annuler la partie
nage. Comme la température de l’eau est extrêmement chaude, c’est assurément
wetsuit interdit et comme je n’ai pas encore une fois nagé en eau libre, ça
ajoute à mes craintes. La rumeur est vite démentie et je devrai nager.
Arrivé à
Raleigh, j’ai pu constater qu’il fessait réellement chaud. La veille je suis
allé faire une reconnaissance des 3 parcours. Première sortie en eau libre de
l’année et première sortie à cette chaleur.
Le cadran
sonne à 3h45 (oui du matin), mon sommeil a été très perturbé. C’est la première
fois que je dors aussi mal avant une course. J’arrive sur place à 4h15 pour
préparer ma zone de transition pour la course à pied puis nous prenons
l’autobus pour se rendre au lac. Le voyage fut mouvementé. J’avais le cœur au
bord des lèvres.
Arrivé au
lac, je me dépêche d’aller préparer ma transition de vélo car c’est encore calme.
Comme j’ai ma pompe, je me fais soudainement plein d’amis. Je mange mon déjeuner
tranquillement assis sur le bord de l’eau et ensuite je me couche un peu pour
essayer de retrouver mon calme. Le site commence à s’agiter et les départs
seront dans quelques minutes. Je vais à l’eau pour donner quelques coups de
bras. Je me sens bien. Je quitte Marilyn pour aller rejoindre mon groupe de
départ. Je croise quelques Québécois, on se dit les encouragements d’usage.
Nous descendons vers la place. La vague précédente part puis c’est à nous
d’entrer à l’eau.
Natation
Le départ
est donné. Comme à mon habitude, je pars derrière le peloton. Comme cela je
m’évite de prendre quelques coups. Mes objectifs sont réalistes. Nager en
continu et nager le plus droit possible. Ces deux objectifs ont bien été respectés.
À
mi-parcours je savais que mon temps ne serait pas extraordinaire, mais je me
suis consolé lorsque j’ai vu des gens accrocher à un kayak qui attendaient
d’être rapporté sur la terre ferme. Devoir abandonner à ce moment doit être
terriblement triste. Ma nage c’est très bien déroulé, mais j’ai probablement
trop travaillé avec mon poolboy cet hiver car mon temps à reflété mon manque de
travail sans aide pour nager.
Temps :
0 :57 :37
Transition #1
Je marche et
je cours pour me rendre à mon vélo. Je suis content parce que le vélo s’en vient,
je sais que je vais me reprendre car j’ai travaillé fort toute l’hiver.
Important il
faut mettre de la crème solaire car le soleil est puissant et les nuages rares.
J’enfile gilet, bas, soulier, casque et hop! Je pars pour le vélo
Vélo
Je pars très
confiant car la veille j’ai roulé le premier 7km et nous avons fait la
reconnaissance des 65 premiers kilomètres.
Dès le
départ, je sens que la chaleur sera un enjeu pour le reste de la journée.
Arrivé au premier turn-around au 5e km, j’entends crier et j’ai à
peine le temps de réagir que je vois une femme qui a perdu le contrôle dans la
descente et elle s’en vient directement sur moi. Elle réussit à reprendre le
contrôle au même moment que je me tasse pour que nous évitions la collision.
Je repars et
c’est la première descente, alors je prends un peu de vitesse. J’ai hâte
d’arriver sur l’autoroute car je trouve que les vallons sont plus difficiles
que je l’avais imaginé. Je sors enfin du parc. 30 minutes pour faire le premier
10 km. Je commence a douter de mon temps. Je dois respecter mon plan
nutritionnel, donc je mange une demi-barre Clifs. C’Est maintenant l’autoroute,
un faux plat descendant. Là je retrouve le feeling que je voulais. Ça roule
entre 35 et 42 km/h et je garde ça pendant plus de 7km, alors je suis très
content.
Les montées
reviennent et je force beaucoup. Je n’arrive pas à prendre de la vitesse. De
plus, aux alentours du 20e km je commence à avoir des crampes au
ventre dès que je mange où je bois. Je me souviens qui est arrivé la même chose
à Tremblant l’an passé et c’était en buvant de l’eau que j’avais réussi à les
faire partir. Mais rien à faire, même lorsque je bois de l’eau les crampes sont
là.
Je continu,
mais je force beaucoup et les montées qui ne sont pas si grande me prennent
beaucoup d’énergie. C’est au 35e km dans une descente où j’arrête de
pédaler et que je vois ma vitesse réduire. Je ne comprends pas trop et j’écoute.
J’entends alors ma roue arrière qui frotte. Je m’arrête un peu après la
descente et vérifie si ma roue ou mes freins ont un problème. Je fais tourner
ma roue et après un quart de tour elle arrête d’elle-même. Mon frein est complément
collé sur ma jante. J’enlève et replace ma roue, mais rien à faire, alors je prends
les grands moyens, je sors mes outils et je desserre la tension de mon frein au
maximum. Il ne frotte presque plus.
Je repars,
mais je sais que je n’ai plus de frein arrière. Une chance que je n’aie pas une
descente comme la Duplessis à faire.
Les crampes
sont toujours là et l’énergie de moins en moins. Je vois que mes freins
reviennent se coller de temps en temps sur ma roue.
Le moral
descend aussi vite que les minutes montent. Je croise des cyclistes pour qui la
journée est terminée. Leurs raisons je ne les connais pas. Je commence à penser
que ma journée se terminera aussi peut-être avec mon vélo derrière une voiture.
Mais comment je vais expliquer aux gens que j’ai abandonnés et avoir faits
toute cette préparation pour ne pas recevoir ma médaille.
Mes idées
sont noires. Le triathlon c’est terminé. Plus jamais j’enfilerai mon vélo.
J’annule ma participation à ma prochaine course de prévu. Je ne suis pas fait
pour faire du triathlon. Je ne suis pas bon.
À 4 km de la
fin, je ne vois toujours pas la ville. Je suis encore entouré de champ et aucune
tour du centre-ville à l’horizon. Il n’y a plus rien qui va, les crampes font
mal, le vélo ne répond pas et l’énergie est absente. Je les vois enfin, mais ce
sont des montées sans fin jusqu’à la zone de transition.
Je parle un
peu avec Marilyn, mais ce que j’ai le goût c’est d’arrêter ça là et de lancer
mon vélo le plus loin possible. Mais non, allons jusqu’au bout.
Temps :
4 :05 :44 (sans les arrêts)
Transition
#2
Ma
transition se passe sans trop d'histoire. Je prends mes Tylenols et mes pilules
de sel. Comme j'ai une petite douleur dû au frottement sur mon pied droit, je
me dis que je vais me mettre du "Body Glyde". Il n'a pas aimé passer
la journée au chaud, c'est maintenant rendu de la crème presque liquide.
De plus, je
remarque que mon voisin avec qui j'avais échangé le matin avant la course et
durant la T1 n'est toujours pas entré du vélo.
Je pars donc
pour ma course
Course à pied
Je pars de
la transition et je prends 2 bouteilles d'eau, l'une que je me jette sur la
tête et l'autre que je bois. Je sais qui fait chaud, mais là c'est pire. Je
pars à la course et le mercure indique 39°C, elle sera difficile.
Après être
sortie du centre-ville, nous prenons une autoroute où l'on se promène dans les
bretelles pour ensuite aller rejoindre un parc. La partie d'autoroute et de
bretelle est d'environ 1.7km et j'aurai à la faire à quatre reprises. Dans
cette partie, il n'y a pas d'ombre ni de point d'eau.
Par la suite,
nous rentrons sur un sentier couvert pour retourner sur une rue que l'on monte
et descend à 8 reprises. Le point positif de cela est que tu peux t'encourager
car tu croises et recroises les mêmes personnes.
Dès le début
de la course à pied, j’ai très peu d’énergie. Je tente de retrouver des forces
en mangeant ce qu’on me donne dans les stations d’aides, mais rapidement je
suis saturé en sucre. Plus aucun gel ne peut entrer. Je cherche donc à prendre
plus des chips et des pretzels, mais il n’y en a pas tout le temps.
Je croise
Marilyn sur le retour de ma première boucle, elle m’attend à l’ombre sous le
dernier viaduc. Je m’empresse de lui demander de la crème solaire car je suis
en train de cuire au soleil. Elle marche avec moi car je n’ai pas l’énergie de
courir.
Je repars
pour ma seconde boucle et je me dis qu’elle doit être plus rapide que la
première. Il reste de moins en moins de coureur sur le parcours. Je croise les
mêmes personnes depuis 2 heures. Ce sont des visages rassurants. Ils ont dans le
même état que moi. Rendu au demi-tour, je commence à reprendre un peu d’énergie.
Depuis un moment je sais que je serai disqualifié, mais je n’ai jamais eu
l’idée d’abandonner. J’ai commencé cette journée et je vais la terminer. Mon
seul souhait, c’est que la ligne d’arrivée soit encore ouverte.
Arrivé au
dernier point d’eau avant de reprendre l’autoroute, j’entends les bénévoles
dire qu’ils ont fait la coupure et que le dernier athlète est le numéro 1219.
Je le connais lui, il est environ 500m dernière moi et nous nous sommes croisés
à plusieurs reprise. Je dois alors mettre la machine en marche parce que pas
question que je ne passe pas le fil d’arrivée. Je n’ai pas enduré toute cette
souffrance pour ne pas atteindre le bout.
Je regarde
presque plus derrière que devant, car bien que ce 1219 était mon voisin de zone
de transition, j’ai bien aimé jaser avec lui. Pour le moment je n’ai pas le
goût de le voir.
Je recroise
Marilyn sous le viaduc. Cette fois je cours et elle m’accompagne. Je retrouve
des forces que j’aurais aimé avoir quelques heures plus tôt. Elle me dit
qu’elle a vu des gens se faire arrêter et ça me donne l’énergie d’aller finir
ce que j’ai commencé.
Il n’y a
plus grand monde au centre-ville pour encourager. Même que les gens me
regardent en se demandant ce que je fais encore là. Je tourne le coin pour le
dernier droit. Un dernier 500m. Il y a une gang qui eut on comme mission de ne
laisser personne terminer dans l’indifférence. Ils crient, encouragent, cours
quelques pas avec moi. C’est l’énergie que j’ai besoin pour courir ce dernier
droit.
Je passe
enfin cette ligne d’arrivée.
Temps :
3 :40 :34
Cette longue
journée fût une dure leçon. Je suis passé par toute la gamme des émotions.
Durant le vélo j’ai voulu tout abandonner. Pas seulement pour la journée, mais pour
toujours. Durant la course je me disais que je ne méritais pas cette médaille
car j’avais échoué.
Après une
bonne douche, un bon souper et du repos, les idées se sont remises en place.
Avec tous les efforts que j’ai mis dans les dernières années, je n’abandonnerai
pas à ce moment. J’ai pris un moment pour analyser ce qui était arrivé. Dans
l’équation il y a évidemment la chaleur, les problèmes mécaniques, les crampes,
mais aussi les 30 livres en trop que je traine depuis trop longtemps et les
béquilles d’entrainements. Je suis aussi responsable de cette performance.
Je crois que
je me relève plus fort de cette course qui je croyais être ma dernière par
moment.
Il y a
beaucoup de gens qui ont cru en moi et qui m’ont encouragé. MERCI, vos mots
sont très appréciés. Des personnes sont importantes dans cette aventure :
Coach
Francis, merci de croire en moi, de prendre du temps pour me rassurer lorsque
je crois que c’est impossible.
Ma
cardiologue et amie Valérie, merci d’avoir pris ton téléphone à 6h30 le matin
pour me dire que je n’allais pas mourir. J
Merci de t’assurer que la machine fonctionne bien.
Évidement
tout ça ne serait pas possible sans le support de mes deux amours Émile et
Marilyn. MERCI d’être présent et de me supporter. Ce fût une très longue
journée pour toi aussi Marilyn.
Et
maintenant si j’allais terminer ce que j’ai commencé…
Temps :
9 :10 :57
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